Vous avez déjà probablement entendu ce nom, ou bien Pelmatochromis (Pelmato), ou encore Kribensis. Cette espèce est bien connue du monde aquariophile, et ce depuis de nombreuses décennies. Et pour cause, Pelvicachromis pulcher est un poisson à la portée de tout débutant en aquariophilie, et peut tolérer quelques erreurs de maintenance.


Origine

Aire de répartition de P. pulcher

La genre Pelvicachromis comporte un peu plus d’une dizaine d’espèces, réparties à travers l’Afrique de l’ouest, de la Guinée à l’Angola. On y retrouve des espèces comme P. roloffi, P. humilis, P. rubrolabiatus, P. subocellatus, etc.
Pelvicachromis pulcher vit dans le golfe de Guinée, majoritairement au Nigéria mais aussi au Cameroun, en zone côtière.

Il fait partie de l’immense famille des cichlidés, et plus précisément des cichlidés nains fluviatiles d’Afrique de l’ouest. Il est donc très différent des cichlidés des grands lacs africains comme le lac Malawi ou le lac Tanganyika par exemple, tant au niveau comportemental que sur son habitat naturel (biotope). Il serait éventuellement possible de faire un parallèle avec les cichlidés nains d’Amérique du sud, qui ont des similitudes notables.


Habitat naturel

La zone côtière tropicale où il vit est rythmée par l’alternance des saisons sèches et saisons des pluies. Le débit des cours d’eau est donc assez variable. Il a une nette préférence pour les ruisseaux et les rivières de petites à moyennes tailles.
De manière générale, l’eau est très (très) douce. La conductivité est presque tout le temps inférieure à 50µS, voire inférieure à 10µS. Le pH dans ce type d’eau est très instable, et peut varier de manière significative au cours de la journée. Néanmoins, il reste majoritairement acide, et même très acide.
La température reste relativement élevée tout au long de l’année, en moyenne entre 24 et 28°C, avec une amplitude thermique jour/nuit de quelques degrés.

Il n’est pas rare de trouver Pelvicachromis pulcher en compagnie d’autres espèces dans le même biotope. On pourra noter par exemple différentes espèces d’Alestidae, des killis, d’autres cichlidés fluviatiles comme Benitochromis, Hemichromis ou même encore d’autres Pelvicachromis (kribensis, ex taeniatus).
Cependant, il n’est pas conseillé de reproduire cette cohabitation en aquarium. L’espace n’est pas le même, et chaque espèce occupe une zone bien particulière. En cas de nécessité, la fuite sera compliquée en aquarium. Nous reviendrons sur cette partie un peu plus tard.

J’ai eu la chance d’observer quelques spécimens au Cameroun lors de différentes expéditions. Voici un exemple typique de son biotope où je les ai rencontrés : une rivière de 2 à 3 mètres de large, avec des zones sans courant et d’autres plus rapides. Le fond est majoritairement composé de sable, avec des branchages et racines permettant un bon nombre de refuges.
La végétation aquatique est quant à elle peu présente. On notera cependant un bon nombre de plantes palustres, comme les Anubia.

Biotope typique à Ndonga (Cameroun), lors de l’expédition ADGP 2011

Comme dit précédemment, l’eau est extrêmement douce et acide. Les paramètres pris à l’instant « t » sur le biotope en photo sont les suivants :

  • température 25.6°C
  • conductivité 4 µS
  • pH 5.4

A noter la présence d’une eau ambrée, typique de cette zone côtière bien souvent forestière.
Les Pelvicachromis pulcher se trouvent principalement sur les zones peu profondes du cours d’eau (moins de 50cm), facilitant ainsi le nourrissage et limitant la prédation par des espèces plus grosses. Leur densité est faible : il n’y a que quelques spécimens (3-4) sur plusieurs mètres.


La maintenance en aquarium

Volume du bac et cohabitation

Cette espèce mesure 8-10 cm pour les mâles et 6-8 cm pour les femelles.
Il leur faut un espace de nage assez conséquent. Mais n’appréciant pas particulièrement une hauteur d’eau importante, il faudra privilégier la surface au sol plutôt que le volume global. Un aquarium de 80cm de façade et 30cm de profondeur est une bonne base pour maintenir l’espèce en spécifique.

Jeune mâle de 4 mois

Le caractère affirmé des cichlidés nains n’est plus à prouver. Pelvicachromis pulcher ne déroge pas à la règle, même s’il reste un poisson assez calme pour un cichlidés nain. Le comportement interspécifique est douteux. Le comportement intraspécifique est mauvais.
Dans l’idéal, il devra être maintenu en couple dans de petits volumes. Ne mettez pas de trio, au risque de voir les deux femelles (ou deux mâles) s’entre-tuer.
Dans un volume plus important (200/400L par exemple), on pourra lui associer une espèce de banc, vivant en pleine eau. Ne mettez aucune autre espèce vivant en zone de fond comme lui. En période de reproduction, cela serait un carnage !
Enfin dans des volumes plus conséquents (600L et plus), les possibilités de cohabitation sont plus importantes. Cependant, je vous déconseille fortement de mettre une autre espèce de cichlidés dans le bac. Même si parfois il n’y a pas de soucis, ce type de maintenance reste très risquée sur le long terme. Et vous ne verrez pas le comportement normal de chacune des espèces (une sera forcément dominée).

PS : Evidemment, dans n’importe quelle configuration, évitez les petites crevettes. Elles serviront d’apéro…

Agencement du bac et éclairage

Pelvicachromis étant une espèce occupant principalement la zone de fond, il faudra que l’aquarium soit aménagé en conséquence.
Pour cela, choisissez un sol de type sable de Loire par exemple, ou tout autre sol neutre. J’insiste sur le « neutre ». Il ne faut en aucun cas que votre sol influe sur les paramètres de l’eau, celle-ci devant être la plus douce possible. Privilégiez donc une eau de pluie ou eau osmosée (disponible facilement en magasin aquariophile par exemple).

Concernant le décor, composez-le essentiellement à base de racines (de mangrove par exemple, qui ont la faculté de pourrir lentement en immersion). Si vous souhaitez ajouter des pierres, là aussi, attention ! Celles-ci doivent être sans influence sur l’eau. Oubliez toutes les pierres de type calcaire par exemple (mais pas que).
Vous pouvez également ajouter des supports de ponte, tels que des demi-noix de coco au niveau du sol. Pelvicachromis pulcher pond dans des cavités, à l’abri des principaux prédateurs (attention aux Ancistrus & co), et donc pondra sous une racine ou dans une noix de coco par exemple. Il se chargera de dégager le sol pour y accéder, ou de le boucher pendant la reproduction.

A propos de l’éclairage, privilégiez une luminosité faible. Une forte intensité lumineuse aura tendance à stresser vos poissons (sans parler de potentiels problèmes d’algues).
Et donc en conséquence, les plantes doivent être choisies de manière adéquates. Les Anubia, Fougère de Java (Microsorum pteropus), mousse aquatiques (de Java par exemple), Ceratopteris, etc. conviendront parfaitement, étant peu exigeantes.
Et pour un aquarium d’un plus bel effet, faites une partie émergée. Vous aurez la chance de voir vos plantes se développer hors de l’eau et de les voir probablement fleurir !

Aquarium de 100x35x20cm

La filtration

La filtration est un élément important du bac, à ne pas négliger. Elle est à adapter en fonction du volume de votre aquarium, et du nombre d’occupants. D’une manière générale, il vaut mieux avoir une filtration un peu plus puissante que pas assez. Il est souvent conseiller d’avoir un débit par heure 2 à 3 fois supérieur au volume du bac. C’est à mon sens le minimum.
Pour de petits bacs, un filtre de type exhausteur peut convenir. Pour plus grands, n’hésitez pas à prendre de bons filtres externes.

Exemple personnel pour un bac de 100cm x 35cm x 20cm (environ 70L) : 2 exhausteurs (à chaque angle du fond), et un filtre interne de 280L/h en façade. Cela évite les zones mortes où peuvent s’accumuler des « déchets ».

La nourriture

C’est une espèce peu difficile à nourrir. Vous pouvez bien évidemment lui donner de la nourriture vivante (évitez les vers de vases). Mais elle accepte très bien du congelé, ou de la nourriture sèche.
Pour diminuer les contraintes, je ne donne que des granulés depuis près de 15 ans, préalablement choisis en fonction de leur composition équilibrée.

Attention à ne pas trop nourrir ! Quelques granulés par poisson tous les jours ou tous les deux jours suffisent. Il ne faut pas qu’ils aient le temps de se retrouver au sol, sous peine d’amener une pollution importante dans l’aquarium.

La reproduction

La reproduction de Pelvicachromis pulcher ne pose pas de souci particulier. C’est une espèce relativement simple à partir du moment où les conditions de maintenance sont correctes.
Privilégiez donc une eau douce, une maintenance en bac spécifique et un espace suffisant, des cachettes à disposition de la femelle, une nourriture adaptée, et des changements d’eau de manières régulières. Ce sont bien souvent ces derniers qui déclenchent la reproduction, lorsque la nouvelle eau est de quelques degrés plus fraîche que celle du bac.

L’élevage des jeunes est sans grande difficulté également. Dès la nage libre, vous pouvez les prélever et les mettre dans un bac d’une dizaine de litres, avec la même eau que le bac d’origine, et une petit filtre exhausteur. Nourrissez quotidiennement, avec de préférence des nauplies d’artémias (à faire éclore), et faites des changements d’eau plus fréquents que sur le bac principal.
Passez petit à petit les jeunes dans des volumes plus grands, pour ne pas freiner leur croissance. Le sexage est possible au bout de 3 ou 4 mois si tout se passe bien.

Reproduction de Pelvicachromis pulcher au C2A

Où s’en procurer ?

Il est possible de trouver sans difficulté des Pelvicachromis pulcher dans les différentes animaleries. C’est une espèce fréquemment vendue, mais attention, pas toujours de belles souches. Ne vous précipitez pas, et achetez-les uniquement lorsque votre aquarium est prêt à les recevoir.

Nous en avons régulièrement de disponible au club.
N’hésitez donc pas à nous contacter !


Ecrit par Christophe Aubin, le mercredi 21 juillet 2021